Migrations
Tous les jours ou presque, sur nous tombent des informations sur des migrants en détresse, que ce soit en Méditerranée, à Calais ou ailleurs. Les morts par centaines, par milliers même, finissent par n'être qu'une nouvelle parmi d'autres, et nous ne voyons plus que des envahisseurs dans ces formes humaines que nous apercevons rapidement sur une image commentée par un journaliste.
Tous les jours ou presque, nous sommes nombreux à râler contre ces migrants qui nous envahissent, et dont nous ne voudrions rien savoir.
Mais si nous regardions un peu l'histoire des migrations, nous devrions pouvoir admettre que ce qui pousse les hommes, les femmes et les enfants à quitter leur quartier, leur pays, est moins le plaisir du voyage que le vœux de survivre.
Qu'est-ce qui a poussé les irlandais à quitter leur île pour les Etats-Unis au 19° siècle, sinon la famine causée par la peste de la pomme de terre. La faim donne des ailes à ceux qui ne veulent pas en mourir. De toute façon, on n'a pas le choix. C'est partir ou mourir, même si on dit que partir est mourir un peu.
Qu'est-ce qui a poussé des couples finlandais à envoyer leurs enfants en Suède, dans des familles d'accueil, à peine cent ans plus tard? Ils ne le faisaient pas pour le plaisir de se trouver en tête-à-tête, mais pour mettre leurs enfants en sécurité pendant la guerre, tout en continuant à se faire du souci pour eux, seuls chez des inconnus, et sans certitude de les revoir un jour. Beaucoup y sont d'ailleurs restés.
Les exemples sont innombrables, les peuples ont toujours migré. Où que nous soyons, nous n'avons qu'à regarder les noms de ceux qui se trouvent autour de nous. Les preuves sont là. Partout.
Ce n'est jamais pour le plaisir qu'on s'entasse dans des bateaux surchargés en mauvais état, sans certitude d'arriver sains et saufs, sans savoir comment on va pouvoir se débrouiller une fois sur place, dans un pays où on ne connait personne, où on ne sait pas très bien comment on va pouvoir gagner sa vie. C'est tout simplement parce qu'on veut une vie meilleure, une vie sans craindre continuellement que quelqu'un vienne vous chercher pendant les heures sombres de la nuit, pour vous fourrer dans un train pour une destination inconnue, tout simplement parce que vous ne plaisez pas à ceux qui sont au pouvoir, ou qui se battent pour y arriver. Voir à votre voisin...
Dans ces cas-là on migre pour survivre, pour ne pas mourir de faim, ou de la main des hommes qui font la guerre. Nous ferions sans aucun doute comme eux, si nous étions à leur place.
Mais nous n'y sommes pas, et nous n'avons pas beaucoup de mémoire. Voilà pourquoi nous ne voulons pas de malheureux chez nous. Comment d'ailleurs recevoir ceux qu'on appelle toute la misère du monde? Nos pays vont mal, ils ont déjà vécu au-dessus de leurs moyens - et continuent de le faire. Comment alors ajouter des coûts supplémentaires aussi pour ceux qui demandent de l'aide? Les excuses sont bonnes.
Empêcher des hommes et des femmes à fuir la misère ou une mort quasi certaine n'est pourtant pas possible, et fermer les frontières ne servira à rien. La faim et la peur de la mort donnent de l'espoir à ceux qui veulent une vie meilleure, une vie tout simplement. Rien ne les arrêtera.
Il n'y qu'une solution, une seule. Il faut tout faire pour qu'il n'y ait pas de famine, pour empêcher la guerre dans les pays d'où viennent les migrants dont nous ne voulons pas, car s'ils avaient de quoi se nourrir, sans avoir à craindre pour leur vie, il est certain qu'ils préféreraient rester chez eux, à quelques exceptions près, car il y aura toujours aussi ceux qui migrent comme moi, sans vraiment y être poussés par la nécessité. Mais nous, nous sommes les bienvenus, car nous n'avons pas besoin d'aide ou de compassion.